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Histoire personnelle, destinée professionnelle...

Isabelle Méténier est psychosociologue, coach et formatrice. Depuis plus de vingt ans, elle s’appuie sur l’approche transgénérationnelle pour accompagner les personnes dans leur évolution professionnelle. Elle les aide ainsi à retrouver une dynamique cohérente et à donner un nouvel élan à leur carrière. Suite à la lecture de son livre "Histoire personnelle, destinée professionnelle", j'ai décidé de la contacter pour vous faire partager son approche très intéressante.

Bonjour Isabelle, merci beaucoup d’avoir accepté cette interview pour Ecoles2commerce.com. Pouvez-vous revenir sur votre parcours tout d’abord ?

Isabelle : J’ai un troisième cycle en psychologie sociale (un DESS, l’équivalent d’un Master2 aujourd’hui). J’ai choisi la psychologie sociale parce qu’elle nous spécialise dans l’interaction entre deux personnes ou plus, et on regarde davantage la pathologie de la relation au lieu de la pathologie d’un individu et comme un individu isolé, ça n’existe pas… En effet, on ne se construit que dans l’interaction et non tout seul ! Tout cela a fondé mes choix.

Je suis aussi certifiée en Analyse Transactionnelle, qui est très structurante et offre une bonne lecture des interactions humaines, notamment avec ce fameux triangle de Karpman " Victime, Sauveteur, Persécuteur "… J’ai réalisé des bilans de compétences, dont je me suis fait une spécialité et j’ai d’ailleurs monté deux formations longues pour former des conseillers en bilan, d’une part pour les adultes, d’autre part pour les adolescents et jeunes adultes, qui, comme vous le savez, hésitent parfois sur leur futur métier !

Lorsque j’ai commencé à travailler, je l’ai fait avec des femmes au chômage de longue durée, et me suis rendue compte qu’on ne pouvait occulter le travail antérieur et son influence sur la santé pour expliquer la difficulté à retrouver un emploi. Puis, regardant les choses d’un peu plus près, je me suis aperçue qu’on ne pouvait non plus occulter l’histoire familiale…

Très bien, vous avez notamment écrit 2 ouvrages dont le premier est intitulé “Histoire personnelle, destinée professionnelle”. Pouvez-vous nous présenter cet ouvrage ?

Isabelle : Cela reprend justement ces découvertes, que j’ai affinées au fil du temps ! Il s’agit de voir la continuité qui existe entre sa propre histoire (notre vision du monde, influencée par notre famille, nous amène à conduire certains choix plus ou moins consciemment) et notre carrière professionnelle. Souvent, on pense que les deux sont bien distincts. Il n’en est rien en réalité.

Untel va réaliser le désir de son père (faire de grandes études), unetelle va faire exactement l’inverse de ce que ses parents voudraient pour elle, soit en se rebellant carrément et explicitement, soit en ratant tous ses examens… la liste est longue. On n’est pas si libre que l’on croit dans ses choix d’orientation !

Dans ce livre, vous vous appuyez notamment sur ce que vous appelez l’analyse transgénérationnelle. En quoi cela consiste-t-il ?

Isabelle : En réalisant ce que l’on appelle un « génogramme professionnel », c’est-à-dire l’arbre généalogique des métiers de la famille, sur plusieurs générations, on peut voir des choses surprenantes, qui nous indiquent que nos choix ont peut-être été influencés par des « tendances familiales » qu’on ignorait. On peut ainsi mieux comprendre notre trajectoire professionnelle. J’anime des stages sur ce sujet.

Vous avez eu l’occasion d’écouter et d’accompagner des diplômés d’écoles de commerce et de management. Qu’est-ce qui vous a le plus frappé chez eux ?

Isabelle : Ce qui me frappe le plus, c’est que souvent, ce sont de bons élèves, même de très bons élèves, qui sont orientés là parce que c’est une voie « générale », et aussi une voie d’excellence. On dit aux jeunes : « Tu auras plus de choix ». Ce n’est pas faux dans un sens, je comprends ce que les gens veulent dire en disant cela.

Sauf que c’est faussé dès le départ car le jeune n’a, en réalité, aucun autre choix que celui de servir le système qui place les meilleurs dans ces voies-là, sans s’intéresser le moins du monde à ses centres d’intérêt profonds. Cela peut apparaître plus tard de façon violente, comme je le vois trop souvent hélas.

Je ne veux pas généraliser, mais parfois les études d’un jeune, surtout si elles sont excellentes, présentent une sorte de « vitrine » pour les parents et leur donne l’impression qu’ils ont réussi l’éducation de leur enfant. Ils sont rassurés ! Mais lorsque l’école de commerce n’est qu’un choix par défaut, cela peut conduire à l’échec, et c’est compliqué ensuite.

Quels étaient leurs problèmes le plus souvent ?

Isabelle : Une démotivation, une impression d’être dans une impasse (ils n’ont plus de « désir » ), une impression de ne jamais pouvoir arriver à réaliser ce qui leur plaît, une culpabilité (proche de la trahison), ou tout simplement un épuisement, une lassitude, voire une dépression.

Avez-vous un exemple concret ou un témoignage qui vous vient en tête ?

Isabelle : Oui j'en ai même beaucoup ! Le premier exemple, c'est celui de Catherine, 28 ans, une jolie femme brune à l'allure timide, qui a un poste respectable au contrôle de gestion dans une grande banque. Elle s'y ennuie ferme, mais ne sait pas vers où s'orienter. Son histoire professionnelle et même son orientation sont banales, comme elle le raconte elle-même :

"Mon bac ? Ben... J'étais bonne en classe, je n'avais pas d'idée sur ce qui m'intéressait, j'ai passé un bac S. Ensuite... toujours pas d'idée... J'ai fait une prépa... Toujours bonne élève, j'ai été admise à Sup de Co... pareil, bonne élève, mais pas de désir particulier. On m'a conseillé la "voie royale", l'option finances. J'ai accepté. Je suis sortie de mon école ; or que fait une jeune femme de 23 ans qui sort d'une école supérieure de commerce avec option finances ? De l'audit. J'ai donc intégré un grand cabinet qui m'a recrutée dès la sortie de mon école, et j'y suis restée trois ans. J'ai été débauchée par la banque, et me voilà. Toujours sans désir, mais avec de plus en plus la certitude que je perds mon temps dans cette voie..." 

Bien sûr, les soeurs de Catherine et même toute sa famille élargie (tantes, cousins, parents, grands-parents) sont issues de grandes écoles. Pas question de déroger à la règle, même si Catherine estime que ses parents sont très ouverts. Suivre la voie tracée est la meilleure façon de se protéger d'une différence difficile à assumer. Et dans ce cas, on voit bien l'influence que peut avoir la famille sur l'orientation et les choix professionnels.

Un autre exemple, c'est celui de Laura, diplômée d'HEC et directrice du marketing internationale dans une grande société informatique. Après avoir participé à des travaux à son domicile, elle découvre ce qu'elle aime vraiment faire : créer à partir de ses mains. Elle quitte son très bon poste pour créer sa société de rénovation dans le bâtiment...

Quels conseils pouvez-vous donner à des étudiants ou à des jeunes diplômés d’écoles de commerce, qui se sentent perdus vis-à-vis de leur projet professionnel ou qui ont des doutes ?

Isabelle : Qu’ils réalisent un bilan d’orientation avec un professionnel ! Un livre est en cours d’une personne que j’ai formée à l’analyse transactionnelle, je peux vous donner ses coordonnées si vous voulez ! Et aussi d’autres coachs de jeunes qui apportent beaucoup d’ouverture : quand on est jeune, souvent, on ne connaît que sa famille comme adultes, et c’est assez limité… Un coach ouvre les horizons, c’est très utile, et il y en a de plus en plus.

Merci à Isabelle pour cette interview ! Si vous avez des questions de votre côté à poser à Isabelle, en lien avec le bien être au travail ou votre projet professionnel, merci de les poster dans les commentaires de l'article. Et pour finir, je vous conseille de jeter un oeil à cette vidéo d'Isabelle, "Quand on aime plus son travail" :

Sébastien Lardez AUTEUR : Sébastien Lardez

Fondateur d'Ecoles2commerce.com et diplômé de GEM. Je blogue sur le monde des grandes écoles de management et m'intéresse particulièrement au web, à l'innovation et au monde de l'entrepreneuriat.

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