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Un voyage en Amérique du Sud pour y étudier la RSE

Bonjour Oriane, bonjour Delphine ! Avant de commencer, peut-être que vous pouvez vous présenter et nous décrire un peu votre parcours jusqu’à aujourd’hui ! D’ailleurs, comment vous connaissez-vous ?

Oriane : Je suis étudiante à l’ESC Grenoble, actuellement en année de Césure. J’ai intégré Grenoble Ecole de Management après avoir obtenu un bac scientifique à Nîmes et réalisé une prépa HEC au lycée Sainte Marie de Lyon. Je suis passionnée de musique et de voyage ! C’est durant ma classe préparatoire que j’ai rencontré Delphine.

Delphine : Oui, nous étions dans la même prépa, et nous avons même vécu ensemble pendant un an dans un foyer de religieuses ! Ensuite je suis allée à l’EDHEC à Lille tandis qu’Oriane est allée à Grenoble (ma ville d’origine). Nous sommes restées de très bonnes amies, unies par une curiosité et un dynamisme communs.

Très bien ! Vous êtes donc parties plusieurs mois en Amérique du Sud dans le cadre du projet Huellas. Tout d’abord, pouvez-vous nous décrire ce projet ? Comment avez-vous eu l’idée de partir en Amérique du Sud ? Une envie d’exotisme ? Une envie de travailler dans la RSE après l’école de commerce ?

Delphine (ci-contre) : Le Projet Huellas, c’est une étude de la Responsabilité Sociétale des Entreprises dans trois pays d’Amérique Latine : le Pérou, le Chili et l’Argentine. Dans chaque capitale, nous avons interviewé des entrepreneurs, des professeurs et des chefs d’entreprise sur leur vision de la RSE et la façon dont ils l’appliquent dans leur entreprise ou dans leur enseignement. Nous avons rencontré en tout 44 entreprises et experts afin de comprendre comment adapter efficacement une politique RSE à un contexte régional particulier.

L’Amérique Latine ça a d’abord été un attrait pour la langue et la culture. Nous avions envie de découvrir ce continent en y faisant quelque chose d’utile qui soit en cohérence avec nos valeurs et nos projets professionnels. La RSE après l’école de commerce pourquoi pas, mais pour moi c’est avant tout une façon de penser le business plus qu’un secteur en soi.

Oriane : Le fils rouge de notre projet est la publication sur notre blog de « bonnes pratiques » que nous relevons dans les entreprises. L’idée est de donner des exemples de mises en pratique concrètes de la RSE. Cela peut prendre la forme d’une multitude d’actions, qui bien souvent ne coûtent pas grand-chose et améliorent considérablement le quotidien des personnes.  Par exemple nous avons rencontré une PME chilienne qui offre à tous les collaborateurs une séance de kiné le vendredi sur deux.

Depuis le lancement de l’initiative l’ambiance et a  vraiment changé sur le lieu de travail et l’investissement des collaborateurs également ! L’idée de parcourir l’Amérique Latine était avant tout un rêve que j’avais depuis mon 1er cours d’espagnol, et un défi que nous nous étions lancées en classe préparatoire ! L’idée a ensuite fait son chemin avant que nous puissions monter un projet qui soit véritablement au service de nos projets professionnels respectifs. Le mien est de faire du conseil en management au niveau international, ce qui est intimement lié à la RSE.

Pourquoi « Huellas »  ?

Oriane et Delphine : Huellas signifie « empreinte » ou « trace » en espagnol. Quelle trace laissera ton entreprise ? Sur la planète mais aussi dans la mémoire collective. Il est de la responsabilité de chacun d’y penser et d’agir en conséquence.

Peut-être que certains de nos visiteurs ne sont pas très à l’aise avec le concept de RSE. Pouvez-vous revenir sur ce concept très « en vogue » en ce moment ?

Oriane : Une entreprise est responsable des impacts de ses décisions et de ses activités sur la société et sur l’environnement. L’objectif d’une politique RSE est de supprimer les impacts négatifs de l’entreprise dans sa sphère d’influence, et dans la mesure du possible de les rendre positifs. Pour déterminer des domaines d’action qui soient pertinents et prioritaires, chaque entreprise doit bien identifier ses impacts et ses parties prenantes (actionnaires, collaborateurs, clients, communauté, tous les acteurs impactés de loin ou de près par l’entreprise) et dialoguer avec eux afin de comprendre leurs attentes.

Delphine : La RSE prend la forme d’actions concrètes et durables en cohérence avec le cœur de métier et les valeurs de l’entreprise. Les impacts de ces actions doivent être mesurés afin que celles-ci puissent s’inscrire dans un processus d’amélioration continue. La cohérence d’un politique RSE passe selon moi par 6 critères :

  • Lien direct avec l’activité de l’entreprise
  • Durabilité des actions
  • Pertinence des actions (adaptée à la réalité et à la complexité de l’environnement de l’entreprise)
  • Professionnalisme dans la gestion des projets
  • Conviction (et non utilitarisme ou pure stratégie !)
  • Communication responsable

Et donc concrètement, qu’avez-vous découvert au cours de votre voyage ? Avez-vous des exemples frappants ? Existe-il beaucoup de différences entre les pays d’Amérique du Sud sur ce sujet ? Et par rapport aux pays occidentaux, est-ce la même approche ?

Oriane : Dans chacun des pays que nous avons étudiés, les entreprises doivent répondre à des enjeux différents. Au Pérou la priorité est de pallier les déficiences de l’Etat et de lutter contre pauvreté. Un modèle très intéressant s’est développé là bas : les « Negocios Inclusivos ». Souvent les grandes entreprises ne peuvent pas s’approvisionner en local car les petits fournisseurs ne remplissent pas les standards élevés garanties par leurs marques.

Ainsi elles ont décidé de former elles mêmes ces fournisseurs et de les aider à grandir. Sur le long terme c’est un investissement plus que rentables pour elles (plus besoin d’importer) et une très bonne contribution au développement local. Au Chili, qui est un pays dont l’économie est basée en grande partie sur les exportations, l’enjeu est actuellement de rattraper les pays les plus développés de remplir toutes les standards et les normes internationales (Normes ISO, directives de la Banque Mondiale, Global Compact).

Actuellement les entreprises travaillent surtout leur transparence (mesure de l’empreinte carbone et rédaction de rapporte de développement durable). Enfin en Argentine, s’il y a une tradition sociale forte, le système est complètement gangréné par la corruption et le marché informel. La RSE est encore très peu développée là bas même s’il suscite un intérêt croissant de la part des entreprises.  J’ai beaucoup aimé là bas l’initiative de Danone qui encourage les collaborateurs qui le souhaitent à monter leurs propres projets sociaux dans leurs quartiers et les accompagne tout au long de la réalisation des projets.

Concrètement les entreprises latino-américaines sont encore beaucoup dans la philanthropie (budget alloués à des projets sociaux n’ayant aucuns liens avec leur activité) tandis que les français se concentrent sur l’optimisation de leurs ressources et la réduction de leurs impacts environnementaux.

Delphine : Pendant le voyage, j’ai découvert deux choses essentielles quant à la mise en pratique de la RSE : D’abord, l’importance de travailler avec des managers convaincus qui sachent communiquer leur enthousiasme aux collaborateurs et mener des projets rigoureux et cohérents. Ensuite, l’importance de bien connaître l’environnement social et culturel, la situation économique, le cadre juridique, etc. Sans cela, il est extrêmement difficile de mettre en place des programmes efficaces et pertinents.

Est-ce que vos écoles respectives vous ont aidé et soutenu dans votre démarche ?

Oriane : Lors de l’élaboration du projet, j’ai travaillé avec des professeurs de GEM qui m’ont été d’une aide considérable. J’ai également collaboré avec GEM GN, l’association des anciens diplômés. En organisant des GiT SiT (Get In Touch Stay In Touch) dans les trois capitales où nous avons fait notre étude, je me suis rendue compte de l’importance de travailler au dynamisme réseau de l’école. J’ai été agréablement surprise par la réactivité des anciens et leur volonté de nous aider.

Delphine : Nous avons également reçu une aide financière et le soutien de nos administrations. Il a fallu beaucoup de persévérance pour les convaincre de notre sérieux et de notre dynamisme mais nous y sommes arrivées.

A la suite de ce voyage, quel message avez-vous envie de faire passer aux futurs managers qui vous lisent en ce moment ?

Delphine : Nous finissons toutes nos conférences par cette phrase de Gandhi, "Vous devez être le changement que vous voulez voir dans le monde », et je crois en effet que c’est quelque chose d’important.  Pour être un manager responsable il n’y a pas besoin de tout plaquer pour aller au bout du monde ou de se spécialiser dans l’humanitaire. La RSE c’est avant tout une façon de penser le business : travailler de façon éthique et durable est de la responsabilité de tous, nous avons vu des exemples de stagiaires qui avaient monté des projets responsables géniaux grâce à leurs convictions. Les entreprises ont énormément d’influence, à nous en tant que futurs managers d’utiliser cette influence au profit de valeurs éthiques et responsables.

Oriane : Je pense qu’il est important de toujours garder un peu de recul sur ce que nous faisons et de se poser les bonnes questions, sur soi même, ce que l’on veut vraiment, mais aussi sur le rôle de l’entreprise. L’homme doit-il est au service de l’économie, ou est-ce l’inverse ? Comment puis-je à mon niveau rendre l’entreprise plus humaine ?

Pour finir, si vous deviez retenir une seule chose de votre expérience ?

Oriane : Il faut apprendre à oser (HEC a bien choisi son slogan). La plupart des barrières nous nous les mettons nous-mêmes… En voyageant on se rend compte à quel point le monde est rempli d’opportunités, qu’un esprit un peu rigoureux et novateur saura saisir.

Delphine : Un manager seul ne peut pas changer le monde mais peut considérablement l’améliorer s’il y contribue à son échelle. Il ne faut pas avoir peur de sortir des sentiers battus.

Merci à vous deux ! On espère que votre témoignage aura donné envie à d’autres étudiants de s’investir,  de s’engager et d’oser entreprendre de tels projets !

Sébastien Lardez AUTEUR : Sébastien Lardez

Fondateur d'Ecoles2commerce.com et diplômé de GEM. Je blogue sur le monde des grandes écoles de management et m'intéresse particulièrement au web, à l'innovation et au monde de l'entrepreneuriat.

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