Alice-Lab, une innovation pédagogique à Novancia !
Il y a quelques semaines, nous avons reçu un communiqué de presse de Novancia au sujet d’un projet expérimental nommé Alice-Lab. J’ai souhaité en savoir plus en interrogeant Caroline Verzat, enseignante-chercheuse en entrepreneuriat à Novancia Business School.
Bonjour Caroline, pouvez-vous nous parler de votre parcours? Que faites-vous aujourd’hui à Novancia ?
C. Verzat : Je suis une enseignante-chercheuse un peu atypique. Après l’ESSEC, j’ai commencé ma carrière dans le domaine de la stratégie et de l’organisation. Puis j’ai décidé de faire une thèse de sociologie au bout de 6 ans d’expérience pour travailler sur les dynamiques d'apprentissage collectif dans les entreprises. Pendant 10 ans, j’ai également occupé un poste de Maître de conférence à Centrale Lille où j'ai piloté les projets d'innovation des élèves ingénieurs. De fil en aiguille, je me suis intéressée au monde de l’entrepreneuriat et c’est assez logiquement que j’ai rejoint Novancia, une école spécialisée sur le sujet. Aujourd’hui, j’y fais de la recherche en entrepreneuriat et plus précisément sur l'éducation et l'accompagnement des entrepreneurs.
Vous êtes à l’origine du projet AliceLab à Novancia. Pouvez-vous nous en parler ? Comment est venue l’idée de ce projet ? En quoi consiste-il ?
C. Verzat : Alice-Lab est d’abord une association de chercheurs-entrepreneurs, passionnés par la recherche en éducation entrepreneuriale et l’innovation pédagogique. Après une première année de réflexion et de conception, nous avons souhaité tester le fruit de nos recherches et réaliser une expérience avec les étudiants de la filière Entrepreneuriat du programme Grande Ecole de Novancia. L’idée, c’était de développer l’esprit d’entreprendre des étudiants à l’occasion d’un projet entrepreneurial ou intrapreneurial, partagé avec des collaborateurs d’une entreprise. Notre objectif éducatif est finalement de provoquer un changement d’attitude parmi l’ensemble des participants à l’expérience Alice-Lab. Pour cela, on s’ancre particulièrement dans la pédagogie de l’action.
En quoi cette expérience est-elle innovante selon vous ? Quelles sont les différences avec les cas d’entreprises que l’on retrouve généralement en école ?
C. Verzat : Le premier point innovant d’Alice-Lab, c’est de mettre les étudiants et les entreprises participantes sur un pied d’égalité. Ainsi, les étudiants et les collaborateurs de l’entreprise travaillent véritablement ensemble. Un deuxième point intéressant, c’est le partenariat avec l’école des Gobelins. Cela permet de réunir 3 populations d’apprenants : les étudiants en management de Novancia, les étudiants en design et communication digitale des Gobelins et les collaborateurs des entreprises partenaires.
Pour les accompagner, nous avons plusieurs coachs par équipe qui proviennent aussi de plusieurs institutions (Novancia, Gobelins, Incubaschool CCI, Alice-lab). Avec des postures d’accompagnement variées et différentes, qui s’adressent aux besoins des 3 publics. Enfin, on peut dire que c’est un projet entrepreneurial de recherche-action-formation. Le rôle des chercheurs est notamment de permettre aux participants comme aux coachs d'expliciter les apprentissages comportementaux souvent implicites et de tirer le maximum de leçons de l'expérience.
Mais sur quels projets travaillent les participants ?
C. Verzat : C’est un peu secret ;) Je peux quand même vous dire ce sont tous des projets de business development dans des situations de concurrence forte. Contrairement à ce que nous imaginions, on ne nous a pas confié des projets dormants, il ont tous des enjeux stratégiques énormes. Il s’agit de défendre ou de maintenir la proposition de valeur de l'entreprise, de développer une nouvelle offre de produits ou de services dans un secteur de plus en plus concurrentiel. Cinq entreprises participent : trois grandes entreprises (Air France-KLM, Neopost, GrDF) qui ont des enjeux de renouvellement de leur offre et deux startups, (MANa et Wiithaa) qui élaborent une offre de service radicalement nouvelle.
Nous avons choisi volontairement des entreprises très différentes pour montrer que la démarche entrepreneuriale s’applique sur plusieurs terrains. L’objectif de chaque projet est finalement de formaliser une offre présentable à des parties prenantes généralement sous une forme numérique interactive (application web, site web, film d'animation... ). Cela se fait notamment par des rencontres et des tests systématiques avec des acteurs concernés par la problématique. On est clairement dans la démarche effectuale.
Quels sont les premiers retours de l’expérience ?
C. Verzat : Nous manquons encore de recul donc c’est clairement un retour à chaud. Pour tous les participants, il y a déjà l’obligation de faire un retour d’expérience à chaque fin de séance, par écrit ou à l’oral. L’idée est de comprendre ce qu’il se passe de leur point de vue, ce qu’ils ressentent, ce qu’ils apprennent, les questions qu’ils se posent… Tout au long du dispositif, il y aussi des chercheurs en doctorat, qui observent ce qui se passe et réalisent des entretiens. En parallèle, nous tournons aussi un film.
De mon côté, ce qui me frappe, c’est l’importance de la prise de conscience des enjeux des projets par les étudiants. C’est assez déstabilisant pour eux. Ils sont vraiment confrontés à la réalité de l’entreprise : à l'intrication des dimensions à prendre en compte, aux contraintes d'acteurs multiples, au manque d'informations exhaustives... Nous pouvons remarquer aussi deux profils qui se démarquent chez les étudiants. Certains sont encore formatés, ils cherchent à dérouler les démarches apprises en cours, d’autres sont plus à même d'affronter l'imprévu, de proposer des démarches audacieuses afin de transformer les contraintes en opportunités. Et puis, la question du temps est vraiment majeure dans ce projet, le planning est assez serré, il faut apprendre à décider de manière intuitive, accepter le principe des essais-erreurs, et surtout confronter rapidement les points de vue pour prendre des décisions optimales.
Je crois finalement que les étudiants se rendent compte de l’importance de convaincre et d’engager toutes les personnes qu'ils rencontrent dans leur projet. D’ailleurs, cela tient souvent beaucoup à l’affect et non à la rationalité. C’est pourquoi, nous avons passé beaucoup de temps au début pour que les étudiants, les salariés et les coachs apprennent à faire connaissance au delà des convenances, à se dévoiler, à être attentifs aux personnalités et aux enjeux des uns et des autres. Le but était aussi de constituer des équipes vraiment motivées à travailler ensemble.
Quels sont finalement les bénéfices de cette expérience pour les entreprises et les étudiants ?
C. Verzat : Les séances de travail en groupe ont débuté en janvier et les équipes présenteront les premiers résultats de leur démarche fin mars. On est bien conscient qu’en 10 semaines, nous n’allons pas tout révolutionner. Notre objectif est avant tout d’enclencher une dynamique, qu’il se passe quelque chose par la suite dans l’entreprise. C’est pourquoi les salariés participent activement aux projets. Et puis la continuité des projets peut se faire aussi, avec des propositions de stages pour les étudiants. Plusieurs sont en cours de négociation.
Article sponsorisé par Novancia Business School.
Fondateur d'Ecoles2commerce.com et diplômé de GEM. Je blogue sur le monde des grandes écoles de management et m'intéresse particulièrement au web, à l'innovation et au monde de l'entrepreneuriat.